Les efforts de formation
Sur cette page:
Historique des efforts de formation
Depuis 1986, la formation continue fait partie des domaines couverts par les accords interprofessionnels négociés tous les deux ans par les partenaires sociaux.
A l’origine, les secteurs et les entreprises étaient encouragés à consacrer 0,5% de la masse salariale à l’emploi et à la formation. Avec le temps, patrons et syndicats constateront la nécessité d’améliorer tous les efforts de formation. C’est ainsi qu’en 1998, ils conviennent de fixer un objectif de dépenses en faveur de la formation continue. Tous les employeurs du secteur privé devaient ensemble investir au moins 1,9 % de la masse salariale totale dans la formation. Si cet objectif n’était pas atteint, les entreprises issues des secteurs réalisant des efforts insuffisants en la matière devaient s’acquitter d'une cotisation patronale complémentaire pour le financement du congé-éducation payé de 0,05 % à titre de sanction (ces secteurs étaient listés annuellement).
La légitimité de ce mécanisme de sanction était très controversée. Les entreprises dénonçaient le fait que les efforts de formation étaient examinés au niveau sectoriel, alors que la sanction était appliquée au niveau de l'entreprise. Ainsi, un employeur qui ne fournissait pas des efforts de formation suffisants mais qui relevait d’un secteur qui, au niveau global, avait fourni suffisamment d'efforts n’était pas sanctionné. En revanche, un employeur qui avait fourni suffisamment d'efforts mais qui relevait d’un secteur qui, globalement, n’avait pas fourni d’efforts suffisants se voyait infliger une sanction. C’est la raison pour laquelle la Cour constitutionnelle et le Conseil d’Etat ont prononcé la nullité de cette sanction en 2016.
Les règles actuelles en matière d’efforts de formation
Suite à cette annulation, la loi du 5 mars 2017 sur le travail faisable et maniable a instauré une nouvelle obligation en matière d’efforts de formation. A partir du 1er janvier 2017, l’objectif d’investissement de 1,9% de la masse salariale a été remplacé par un objectif interprofessionnel de 5 jours de formation en moyenne par an et par équivalent temps plein. Cela signifie que l’ensemble des employeurs visés du secteur privé doivent atteindre une moyenne de 5 jour de formation par an et par équivalent temps plein. Il s’agit bien d’une moyenne par an et par ETP et donc pas d’un droit individuel pour chaque travailleur à 5 jours de formation par an.
Cet objectif de 5 jours ne doit toutefois pas être atteint immédiatement. Chaque secteur doit déterminer une trajectoire de croissance afin d’atteindre progressivement cet objectif de 5 jours de formation en moyenne. Actuellement, aucune échéance n’est fixée dans la loi pour atteindre cet objectif. De plus, aucun mécanisme de sanction n’est prévu dans le cas où un employeur/secteur ne répond pas à ses obligations.
Les façons de remplir cet objectif
La loi du 5 mars 2017 prévoit trois façons de concrétiser cet objectif de formation interprofessionnel de 5 jours :
-
Par la conclusion d’une nouvelle CCT sectorielle
Cette CCT doit prévoir au minimum un effort de formation de 2 jours en moyenne par an par ETP et une trajectoire de croissance qui fixe dans quelle mesure le nombre de jours de formation est augmenté afin d’atteindre l’objectif interprofessionnel de 5 jours de formation en moyenne par an par ETP. -
Par la prolongation d’une CCT existante conclue pour les périodes 2013-2014 et 2015-2016
Cette CCT doit prévoir au minimum un effort de formation au moins équivalent à l’effort de formation existant au niveau de la branche d’activité et une trajectoire de croissance qui fixe dans quelle mesure le nombre de jours de formation est augmenté afin d’atteindre l’objectif interprofessionnel de 5 jours de formation en moyenne par an par ETP. -
Par l’octroi de jours de formation sur un compte formation individuel
Lorsqu’aucune CCT sectorielle en matière de formation n’a été conclue, l’employeur peut prendre l’initiative de mettre en place un compte individuel de formation pour le travailleur. Ce compte formation individuel est un compte individuel reprenant le crédit formation dont dispose le travailleur. Ce crédit formation ne peut en aucun cas être inférieur à 2 jours par an pour un travailleur occupé à temps plein durant toute l’année. Le compte formation doit également prévoir une trajectoire de croissance pour atteindre l’objectif interprofessionnel de 5 jours de formation en moyenne par an par équivalent temps plein.
Régime supplétif en cas d’absence de CCT et de compte individuel
Si aucune CCT octroyant des jours de formation n’a été conclue et que le travailleur ne dispose pas d’un compte formation individuel, le travailleur peut prétendre, à titre individuel, à un droit à la formation de 2 jours en moyenne par an et par équivalent temps plein.
Les formations peuvent être suivies par le travailleur soit pendant son horaire de travail habituel soit en dehors de celui-ci. Lorsqu’une formation est suivie en dehors du temps ordinaire de travail, les heures correspondant à la durée de la formation donnent droit au paiement de la rémunération normale sans sursalaire éventuel.
Régime dérogatoire pour les petites entreprises
Les obligations en matière d’effort de formation s’applique aux employeurs du secteur privé qui occupent au minimum 10 travailleurs. Les employeurs occupant moins de 10 travailleurs sont exclus du champ d’application et ne sont donc pas concernés par ces obligations en matière de formation.
Pour les employeurs occupant au minimum 10 travailleurs et moins de 20 travailleurs, un régime dérogatoire est prévu. En effet, l’employeur doit prévoir au minimum 1 jour en moyenne par an et par équivalent temps plein. Le nombre de jours de formation fixé par l’employeur ne peut toutefois pas être inférieur au nombre de jours de formation prévus au niveau de l’entreprise durant la période 2015-2016.
Le nombre de jours fixés par l’employeur est d’application pour la période 2017-2018 et pour toutes les années qui suivent, à moins que l’employeur décide de revoir ce nombre de jours de formation à la hausse.
L’employeur doit également déterminer une trajectoire de croissance, de manière à ce que l’objectif interprofessionnel de 5 jours de formation en moyenne par équivalent temps plein puisse être atteint.
Bientôt du changement ?
Le gouvernement a récemment indiqué qu’il souhaitait réformer les règles en matière de droit à la formation. Si nous connaissons les grandes lignes de la réforme envisagée par le gouvernement, nous n’en connaissons pas encore les détails.
Le gouvernement prévoit que chaque salarié bénéficiera d’un droit individuel à la formation. Ce droit à la formation équivaut à 5 jour par an et par ETP. Une trajectoire sera élaborée pour atteindre cet objectif d’ici 2024.
Ces 5 jours par ETP sont une moyenne étalée sur plusieurs années. Concrètement cela signifie qu’il est possible qu’un travailleur reçoive plus que 5 jours de formation au cours d’une année donnée et moins une autre année. L’objectif du gouvernement est de rendre flexible la mise en œuvre du droit individuel à la formation et d’offrir la possibilité de varier le nombre de jours de formation en fonction du besoin du travailleur. La période sur laquelle la moyenne de 5 jours par ETP par an doit être respectée ne peut pas dépasser 5 ans.
Le gouvernement prévoit de lier le droit individuel au compte formation individuel lorsque ce dernier sera mis en place. Mais le gouvernement précise que l’application du droit individuel à la formation pourra débuter avant l’entrée en vigueur du compte formation.
Certaines dispositions de la législation actuelle en matière de formation reste inchangée. Il s’agit :
- de la définition de l’éducation et de la formation
- du régime d’exception et des dérogations, pour les PME de moins de 10 travailleurs et celles de moins de 20 travailleurs, qui restent exactement les mêmes que ceux prévus dans la législation actuelle
- aucun mécanisme de sanction n’est prévu
Enfin, il est précisé que les partenaires sociaux peuvent déroger à ces règles par CCT. Cependant, les modalités exactes concernant la façon dont les partenaires sociaux (au niveau interprofessionnel, sectoriel, entreprises ?) pourront prévoir ces dérogations ne sont pas précisées.
La grande caractéristique de ce droit à la formation est donc sa flexibilité. Cela signifie qu’un travailleur pourrait ne se voir proposer aucune formation pendant 4 années et ensuite devoir suivre 25 jours de formation durant la 5ème année. Dans un tel système, on peut déjà s’interroger sur la mise en œuvre concrète de ce droit pour les travailleurs qui ne presteraient pas pendant 5 ans chez le même employeur, et qui pourraient constituer un des groupes cibles qui a le plus besoin de formations.