Qui peut être candidat ? Quelles sont les conditions à remplir pour être candidat ? Et ne devez-vous pas craindre que votre employeur réagisse négativement à votre candidature ? Dans cet article, nous examinons les conditions à remplir pour que la candidature d'un travailleur aux élections sociales soit valable.
Moment où les conditions doivent être remplies
Les listes de candidats doivent être remises à l'employeur au plus tard le jour X+35 (du 19 mars au 01 avril 2024, en fonction de la date des élections).
Toutefois, les conditions relatives aux candidats ne doivent pas être remplies au moment du dépôt des listes de candidats, mais le jour des élections (du 13 au 26 mai). (Cour suprême 22 juin 1993, Arr. Cass. 1991-92, 1016).
De même, en cas de licenciement en violation de la protection contre le licenciement, les conditions sont examinées à la date des élections (Tribunal du travail de Bruxelles 02 mai 2016, 16/976/A)
Les conditions
Être travailleur de l’entreprise
Pour se porter candidat, il faut être travailleur de l'entreprise. Il faut donc être lié par un contrat de travail ou d'apprentissage avec l'entreprise.
Les travailleurs assimilés ne peuvent pas se porter candidats (Tribunal du travail de Bruxelles (Fr) 26 octobre 2020, AR 20/3480/A)
Les intérimaires ne peuvent pas non plus déposer leur candidature à l'entreprise qui les emploie (l'"utilisateur"). En effet, l'intérimaire est lié par un contrat de travail avec l'agence d'intérim et non avec l'utilisateur.
La candidature d'un travailleur qui est certain qu'il ne sera plus occupé à la date de l'élection est irrégulière et doit être retirée de la liste (Tribunal du travail d'Anvers 25 avril 2012, AR 12/2429/A)
Condition d’ancienneté
Les travailleurs qui se présentent aux élections doivent pouvoir justifier d'une certaine ancienneté dans l’entité juridique ou l'unité technique d’exploitation :
- soit une ancienneté continue d'au moins six mois ;
- soit d'une durée totale d'emploi d'au moins neuf mois pendant plusieurs périodes en 2023.
Si l'entité juridique est divisée en plusieurs unités techniques d'exploitation, la condition d'ancienneté implique que le candidat ait au moins six mois de service ininterrompu, ou au moins neuf mois de service interrompu dans l'entité juridique et donc pas nécessairement dans l'unité technique d'exploitation où il se présente candidat (Tribunal du travail de Bruxelles 26 octobre 2020, AR 20/3480/A).
Les périodes de suspension de l'emploi telles que, notamment, la maladie, le chômage temporaire ou le congé annuel sont prises en compte dans la détermination de l'ancienneté requise pour être éligible (Cour de cassation 02 mars 1992, JTT 1992, 173). Ainsi, aucune condition de présence effective dans l'entreprise ne s'applique.
Les courtes pauses ne sont pas non plus prises en compte. Ainsi, le tribunal du travail de Louvain a jugé qu'une interruption de deux jours entre deux contrats de travail n'avait pas interrompu l'ancienneté du travailleur. Le tribunal a constaté qu'entre les deux contrats de travail, il y avait un jour férié et un jour de fermeture collective (tribunal du travail de Louvain, 4 avril 1991, RSR 1991, 263).
Lors de la reprise d'une entreprise en vertu de la CCT 32bis, le travailleur reprend l'ancienneté qu'il avait acquise dans son ancienne entreprise (Tribunal du travail de Bruxelles 23 avril 2004, 73.176/04). Par contre, l'ancienneté conventionnelle n'est pas prise en compte (Tribunal du travail de Courtrai 07 mai 2008, 08/614/A).
Les périodes où l'on a été employé dans l'entreprise utilisatrice en tant que travailleur intérimaire n'entrent pas en ligne de compte pour l'ancienneté. En effet, il n'y a pas de contrat de travail entre le travailleur et l'utilisateur (Tribunal du travail de Liège 23 avril 2012, AR 405.816 et 405.817).
Condition d’âge
Les candidats doivent être âgés d'au moins 18 ans et ne peuvent avoir 65 ans à la date de l'élection. Une exception est toutefois prévue pour les jeunes travailleurs : ils peuvent être candidats dès l'âge de 16 ans mais doivent être âgés de moins de 25 ans. Il s'agit d'âges minimum et maximum. La candidature d'un travailleur âgé de 67 ans n'est pas valable (Tribunal du travail de Louvain, 27 octobre 2020, 20/608/A).
Ne pas appartenir à une certaine catégorie du personnel
La loi a expressément prévu que le personnel de direction, les conseillers en prévention et la personne de confiance (au sens de la loi sur le bien-être au travail) ne peuvent pas être candidats.
Les conditions d'éligibilité doivent être remplies le jour de l'élection. Si un candidat est encore une personne de confiance au moment de la nomination, la candidature est valable à condition
qu’elle ait démissionné de sa fonction de personne de confiance avant le jour de l'élection (Tribunal du travail de Bruxelles 02 mai 2016, 16/976/A)
En ce qui concerne les conseillers en prévention, cette condition d'éligibilité s'applique à tous les conseillers en prévention, quelle que soit leur spécialisation. En outre, elle s'applique également aux conseillers en prévention adjoints et remplaçants (Tribunal du travail de Courtrai 28 mai 2008, AR 08/671/A et Tribunal du travail de Bruxelles 21 avril 2008, AR 5338/08). Même si une personne n'est conseiller en prévention que pendant 10 % de son temps de travail, elle ne peut pas être candidate (Tribunal du travail de Gand, 19 avril 2012, AR 12/885/A).
Appartenance à l’unité technique d’exploitation
Les candidats doivent appartenir à l'unité technique d'exploitation dans laquelle ils sont employés.
Un travailleur travaillant exclusivement dans une unité technique d'exploitation ne peut pas être candidat dans une autre unité technique d'exploitation (Tribunal du travail de Bruxelles, 2 novembre 2020, 20/3600/A).
Un employé travaillant dans une autre unité technique d'exploitation ne peut pas être candidat même s'il a été inscrit par inadvertance sur les listes électorales (Tribunal du travail de Gand 21 octobre 2020, AR 20/829/A).
Une candidature d'un travailleur qui n'appartient pas à l'unité technique d'exploitation est irrégulière (Tribunal du travail Bruxelles (Fr) 18 novembre 2020, AR 20/3733/A).
Un travailleur qui ne fait pas partie de l'unité technique d'exploitation à la date X et ne figure donc pas sur la liste électorale, mais qui devient membre de cette unité technique d'exploitation à la suite d'une fusion par absorption de son employeur entre la date X et la date X + 35, peut être valablement désigné comme candidat pour autant que les autres conditions d'éligibilité soient remplies (Tribunal du travail de Liège, division de Liège 22 octobre 2020, AR 20/2750/A).
Candidats par catégorie
Des listes de candidats peuvent être déposées dans une entreprise pour les ouvriers, les employés, les jeunes travailleurs (s'ils ont moins de 25 ans) et les cadres (s'ils sont au moins 15 et uniquement pour le Conseil d'entreprise). Un candidat ne peut figurer que sur une seule liste, à savoir celle à laquelle il appartient luimême en vertu de son inscription sur la liste électorale. Ainsi, un travailleur inscrit sur la liste électorale des cadres ne peut pas se porter candidat pour les employés (Tribunal du travail de Bruxelles 22 avril 2016, 16/969/A). Toutefois, l'inscription sur une liste électorale n'est pas un critère d'appréciation de l'éligibilité ou de l'inéligibilité mais constitue uniquement un critère de vérification de la catégorie d'appartenance (Cour de cassation 05 janvier 2009, S 080101.N).
Si le candidat figure sur deux listes (de catégories ou d'unions différentes), les conséquences ne sont pas minces : dans ce cas, la jurisprudence considère que les deux candidatures sont nulles (Tribunal du travail du Hainaut, division de Charleroi 2 novembre 2020, 20/1595/A, tribunal du travail du Hainaut, division de Mons 2 novembre 2020, 20/1061/A). Le candidat écarté ne bénéficie donc d'aucune protection contre le licenciement.
Mais qu'on ne s'y trompe pas : rien n'interdit au travailleur d'être à la fois candidat au Conseil d’entreprise et au CPPT.
Autres conditions
- Il ressort implicitement de la législation qu'un syndicat ne peut présenter que des candidats qui sont membres de cette organisation (Tribunal du travail de Bruxelles 23 avril 2004, 73.169/04).
- La désignation des candidats doit être un acte volontaire (Tribunal du travail d'Anvers 22 avril 2008, 08/2354/A).
- La présence du candidat sur la liste électorale n'est pas une exigence (Cour de cassation 05 janvier 2009, S 080101.N). En termes de moralité, de convenance, de compétence, aucune condition n'est imposée (Tribunal du travail de Bruxelles 25 avril 2016, 16/3666/A). Ceci sera évalué par les électeurs au moment du vote.
- Il n'est pas possible de considérer les compétences linguistiques comme condition d'éligibilité (Cour de cassation 16 janvier 1984, Soc. Chron. 1984, 386).
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En ce qui concerne la nationalité, aucune condition ne s'applique. Tous les travailleurs, quelle que soit leur nationalité, qui sont légalement occupés en Belgique peuvent être désignés comme candidats.
Et l'employeur : a-t-il son mot à dire ?
Dans ce processus, l'employeur doit-il rester passif ou peut-il réagir contre les candidatures ? En principe, il n'appartient pas à l'employeur de juger de la convenance ou de la moralité des candidats. L'affirmation selon laquelle le candidat ne serait pas en mesure de remplir efficacement son mandat s'il était élu n'est pas pertinente. En effet, il s'agirait d'une condition supplémentaire d’éligibilité (Tribunal du travail de Bruxelles 21.04.2008, AR 5353/08).
L’employeyr doit-il se contenter de rester les bras croisés ?
Non, il peut contester la validité de la candidature en démontrant un abus de droit, même si le candidat remplit toutes les conditions. C'est le tribunal du travail qui décide et qui a le dernier mot. Les nombreuses décisions des tribunaux en la matière sont variées et semblent parfois contradictoires, ce qui peut s'expliquer par le fait que chaque cas implique une évaluation de circonstances factuelles différentes. Une candidature visant à bénéficier d'une protection plutôt qu'à participer à la concertation sociale est nulle et non avenue (Tribunal du travail d'Anvers, Division d'Anvers, 2 novembre 2020, 20/2309/A).
Il appartient à celui qui conteste la candidature de prouver l'abus de droit (Cour de cassation 6 octobre 2014, S.10.0041.F). En cas de doute, la preuve n'est pas apportée (Tribunal du travail de Bruxelles 25 avril 2016, 16/36666/A).
Si un travailleur a été licencié avant sa candidature, l'employeur devra prouver que le travailleur n'aurait pas posé sa candidature s'il n'avait pas été licencié (Tribunal du travail de Gand 21 avril 2016, 16/820/A).
Une absence prolongée n'est pas en soi un indice d'abus de droit, sauf s'il y a impossibilité d'exercer le mandat ou si le travailleur ne semble pas disposé à reprendre sa place dans l'entreprise (Tribunal du travail de Gand 15 avril 2016, AR 16/179/A).
Un futur représentant des travailleurs ne peut être licencié pour motif grave que si ce motif est reconnu à l'avance par le tribunal du travail. Entre-temps, le contrat de travail peut être suspendu et la personne peut être candidate (Tribunal du travail d'Anvers 10 avril 2012, AR 12/2177/A). Mais dans une affaire soumise au tribunal du travail de Tournai, une plainte pénale avait été déposée contre l'employé concerné. Pendant la longue durée de la procédure pénale, le contrat de travail avait été suspendu. L'employé a néanmoins posé sa candidature pendant cette période de suspension. Le tribunal a considéré qu'il s'agissait d'un abus de droit (Tribunal du travail de Tournai, 9 juin 2000).
Une protection occulte contre le licenciement
Les travailleurs qui se présentent aux élections sociales bénéficient d'une protection spéciale contre le licenciement.
Il n'est pas inconcevable qu'un employeur recueille des rumeurs sur l'intention d'une personne de se porter candidate avant même le dépôt de la liste des candidats. Ce dernier n'oserait-il pas alors y mettre un terme ?
Pour éviter cela, les travailleurs sont protégés contre le licenciement avant que l'employeur n'ait connaissance de leur candidature, ce que l'on appelle la période de protection occulte. Cette protection commence 30 jours avant l'affichage de l'avis annonçant les élections sociales (X – 30, du 14 au 27 janvier, en fonction de la date des élections), et donc avant l'annonce officielle des candidatures. Si le travailleur est néanmoins licencié pendant cette période occulte, il devra demander sa réintégration dans l'entreprise (dans ce cas, consultez sans tarder votre secrétaire permanent).