Dans son podcast publié début août, le Syndicat libéral a évoqué les plans cafétérias, une forme alternative de rémunération de plus en plus populaire mais qui n’est pas sans risque.
Qu'est-ce qu'un plan cafétéria ?
Bien qu’il n’existe pas de définition juridique, la façon la plus commune de définir un plan cafétéria est « un système salarial dans lequel les travailleurs peuvent choisir un ou plusieurs avantages extra-légaux proposés par l’employeur dans les limites du plan ». L’employeur fixe en amont un budget et diverses options qui constituent des « avantages extra-légaux » disponibles que le travailleur peut ensuite choisir en échange d’une baisse de sa rémunération brute et/ou de sa prime de fin d’année.
La notion d’avantage extra-légal est assez large, puisqu’elle constitue tout avantage soumis à l’ONSS et imposable, allant de la disposition gratuite d’un logement, d’un véhicule de société (y compris le carburant), de prêts à des conditions avantageuses, de primes d’assurances payées par l’employeur, ou encore d’un GSM ou d’un ordinateur, même pour un usage privé.
Un système populaire
Les plans cafétérias ont le vent en poupe. D’après une évaluation de l’ONSS et de SDWorx, tous les types d’avantages ont été de plus en plus octroyés au cours des dernières années, que ce soient avantages mobilité, les bonus et primes, les avantages santé et bienêtre, les chèques, ou encore les appareils multimédia.
L’avantage pour le travailleur est qu’il va pouvoir sélectionner les avantages extra-légaux qui répondent le plus à ses besoins. Sa rémunération brute est convertie en net et contribue à améliorer son pouvoir d’achat. En réalisant des simulations de l’impact des avantages extra-légaux sur différents niveaux de rémunération, nous constatons que la différence en salaire net n’est pas très grande, alors que le travailleur qui bénéficie des avantages va pouvoir réaliser des économies sur plusieurs postes de dépense (voiture, factures de téléphonie, etc.).
Encadrement
Bien qu’il n’y ait pas de cadre juridique spécifique aux plans cafétérias, les employeurs ne font pas ce qu’ils veulent et doivent répondre à certaines règles que l’on retrouve dans le droit du travail, le droit fiscal et le droit de la sécurité sociale. Tous les secteurs n’autorisent pas la conversion d’une partie de la prime de fin d’année. Il ne faut pas non plus qu’un plan cafétéria fasse passer le salaire brut du travailleur sous le seuil du salaire minimum défini par le secteur.
Un plan cafétéria ne se décide toutefois pas au niveau sectoriel, mais uniquement au niveau de l’entreprise, soit via une CCT d’entreprise ou une convention individuelle. De notre point de vue syndical, il est évidemment préférable de le négocier collectivement en CCT afin d’obtenir les meilleurs avantages possibles pour les travailleurs, là où il y a plus de risques en convention individuelle.
Afin d’éviter les abus, une proposition de loi relative aux plans cafétérias avait été lancée en janvier 2021. Elle visait également à remédier au déséquilibre apparu entre ce mode de financement de la sécurité sociale et l’allègement visé des charges salariales afin de ne pas compromettre le financement de la sécurité sociale. La CGSLB a interrogé ses membres sur la nécessité d’un cadre juridique propre aux plans cafétérias : 72% étaient pour sa mise en place. Lorsqu’on ne prend en compte que les délégués, cette part grimpe à 76% (68% pour les affiliés). L’actuel ministre des Finances, Vincent Van Peteghem, est du même avis puisqu’il a proposé une grande réforme sur les formes alternatives de rémunération. Selon lui, la rémunération en argent doit devenir la norme, et il convient d’éviter l’utilisation des plans cafétérias par les employeurs à des fins d’optimisation.
À ce titre, la CGSLB propose de mettre en place des mécanismes de contrôle à différents niveaux pour s’assurer que l’employeur recoure aux prefilings ou rulings fiscaux auprès du SPF Finances afin de s’assurer de la légalité des plans cafétérias et que l’employeur ne recoure pas systématiquement à cette pratique dans un but d’évitement fiscal.
Inconvénients
Il faut garder à l’esprit que lorsqu’un travailleur décide de convertir sa rémunération brute en avantages extra-légaux, cela fait baisser sa cotisation à la sécurité sociale. Cela a un impact sur sa pension légale, sur ses indemnités de maladie, de chômage, etc. À grande échelle, cela pose également un problème de financement de la sécurité sociale. C’est pourquoi la CGSLB propose de mettre en place une obligation systématique d’information de l’employeur envers les travailleurs sur les conséquences de l’adhésion d’un plan cafétéria en ce qui concerne leur rémunération et l’impact sur leurs droits sociaux des différents avantages choisis.
Nous plaidons également pour la mise en place d’un organe de suivi du contrôle des plans cafétérias composé paritairement de l’ONSS, du fisc, et des partenaires sociaux. Au niveau de l’entreprise, le Conseil d’entreprise (CE) devrait être tenu informé par l’employeur des avantages inclus dans les plans cafétérias, des montants que ceux-ci représentent
et de leur impact sur la sécurité sociale.
Un travailleur doit donc rester bien conscient des conséquences de ses choix lorsqu’il se lance dans un plan cafétéria, car si ses gains sont immédiats, il peut ensuite subir des pertes futures, notamment au moment de sa pension. Un plan cafétéria n’est pas non plus modulable à volonté et à tout moment. Par exemple, si un travailleur opte pour la voiture de société, il s’y engage pour plusieurs années, et cela peut avoir des conséquences négatives en cas de maladie de longue durée (l’employeur va-t-il reprendre la voiture dans ce cas ?) ou lors du versement de la prime de fin d’année. La situation du travailleur à un moment donné est susceptible de changer.
De plus, le fait qu’une banque octroie ou non un prêt à un particulier va dépendre de son salaire, sans prendre en compte le fait qu’il a une voiture de société, un smartphone, un abonnement ou d’autres avantages.
Ces inconvénients montrent la nécessité d’établir un cadre législatif stable pour les plans cafétérias. Le Syndicat libéral propose également la mise en place du consentement du travailleur d’adhérer au plan cafétéria, avec la possibilité de retirer ce consentement à tout moment. Au niveau budget, nous estimons qu’un plan cafétéria ne devrait pas dépasser 10% du coût salarial brut par travailleur sur une base annuelle et qu’il faut fixer une limite absolue de 6 fois le revenu mensuel minimum moyen. Enfin, les frais administratifs du plan cafétéria doivent être entièrement à charge de l’employeur. L’employeur ne peut pas demander aux travailleurs de contribuer à ces frais.
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